house of memories
27.02.578
Ce que l’on garde en souvenir en dit plus long que les évènements de notre vie.
La mémoire est sélective. Elle ne garde que les éléments les plus importants, les plus marquants, les plus répétés. On peut se souvenir d’une odeur, sans en associer l’image. On peut se rappeler une phrase, sans en retrouver le contexte.
Une scène peut être vue, entendue et vécue d’autant de manières différentes que de protagonistes.
Du souvenir, ne reste finalement qu’un amas de subjectivité, déformé par le temps.
De cette journée aride, Lance se rappelait le soleil brûlant, menaçant sa peau trop blanche. La chaleur suffocante de l’air trop chaud. Le sable étincelant, l’aveuglant de ses reflets.
Il se souvenait surtout de cette fille, à l’apparence frêle, mais au regard belliqueux. De ses yeux, qui semblaient emplis de détresse, alors qu’elle repoussait vivement son aide.
Il se rappelait des cheveux si blancs, qu’ils contrastaient avec sa peau sombre ; du bleu de ses iris.
De son cœur serré, de la sensation fébrile d’impuissance.
Le souvenir est intime. Pas tant pour ce qu’il s’y était déroulé que pour l’importance émotionnelle - et sentimentale, d’ailleurs - qu’il avait pour lui.
Qu’une inconnue en soit témoin, bien que ce ne soit qu’un aperçu, fit naître un mélange de gêne et de sensations désagréables dans le creux de son estomac.
Ce souvenir m’appartenait, oui. Inutile de mentir, puisqu’il ne pouvait provenir que de l’un d’eux. Il ignora délibérément la question, cependant. Peut-être n’était-elle que rhétorique, destinée à démontrer qu’elle ignorait de qui il s’agissait ; quoi qu’il en soit, il ne souhaitait s’y attarder.
Il avait trop à en dire. Et pas assez, à la fois.
Le sujet était trop délicat.
Et c’est bien ce que je disais. S’attarder ici n’attire que ce genre de problème, on finit happé par les souvenirs. Son air revêche refait surface, l’expression de son visage se révélant maussade. Ce n’est pas de moi dont tu devrais avoir peur, ajoute-t-il en croisant ses bras - il n’allait pas prendre le risque de tendre à nouveau sa main. Laisse-moi te guider hors d’ici.